Urbanisme et architecture à Nantes

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Nantes a arboré de multiples visages urbains qui sont liés à l’histoire de la ville. Cependant, elle conserve une harmonie architecturale qui est dûe aux politiques publiques successivement menées par la municipalité. En effet, une volonté profonde a su perdurer à travers les siècles : inscrire Nantes dans la droite lignée de son passé.

Le XIXe siècle : Nantes pionnière de l’industrie et des transports

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Dans le Nantes des années 1800, un mouvement urbanistique vit à travers les réalisations d’Henri Driollet : l’hygiénisme. Nommé au poste d’architecte municipal, l’homme met en place les premiers réseaux publics de distribution d’eau et de gaz. La fontaine de la place Royale est l’une de ses réalisations, qu’il qualifie de “partie poétique et artistique du programme hydraulique”.

À compter de 1830, la ville de Nantes peut être qualifiée de “bourgeoise” et “ouvrière”.

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Bourgeoise parce que, suite à la Révolution française, la société nantaise est fortement influencée par une élite issue des milieux industriels et du négoce. À l’époque, quelques adresses de la ville dénotent la volonté de représentation de la bourgeoisie, comme par exemple :

La ville de Nantes est également “ouvrière” en raison d’une industrialisation galopante, qui débute à partir de la seconde moitié du XIXe siècle. Le caractère fluvial de la ville facilite son développement :

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Dans un même temps, l’économie de la région se voit soutenue par la construction navale ainsi que par la métallurgie.

Les villes accueillant des usines voient arriver une population ouvrière en masse. Majoritairement bretonne et pauvre, cette population subit la promiscuité au sein de logements insalubres.

Sous l’oeil attentif de Jules Vernes (1828 - 1905), l’activité du port rythme les deux rives de la Loire.

“Je revois la Loire, dont une lieue de ponts relie les bras multiples, ses quais encombrés de cargaisons, sous l’ombrage des ormes, et que la double voie de chemin de fer, les lignes de tramway ne sillonnaient pas encore. Des navires sont à quai sur deux ou trois rangs ; d’autres remontent ou descendent le fleuve”
Jules Verne, Souvenirs d’enfance et de jeunesse

Une loi, promulguée en 1850, rend les expropriations aisées dans les quartiers touchés par l’insalubrité, comme c’est le cas du Marchix et de l’Hermitage. Jusqu’en 1865, les percées Haussmanniennes sont pratiquées dans la ville. Cependant, elles concernent uniquement les voies dites “impériales” telle que la rue de Strasbourg.

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L’expansion économique de Nantes permet une véritable révolution des transports en commun. Le premier réseau de tramways français voit le jour dans la cité des Ducs. Dès 1851, une liaison ferroviaire se déploie en plein coeur de ville et emprunte les quais de la Loire pour rejoindre le port. Ces avancées en matière de transport valent à Nantes une réputation de “pionnière”.

À cette époque, la politique urbaine est utilisée comme une arme de conquête. Pour exemple, les boulevards de ceinture, achevés en 1898, annoncent l’appropriation des villes voisines telles que Doulon et Chantenay.

Aussi, le XXe siècle démarre avec un projet d’urbanisme à même de codifier la croissance des villes. C’est le “plan d'extension, d'embellissement et d'aménagement”, qui sera à l’oeuvre à compter de 1918.

Les adieux à la “Venise de l’Ouest”

Entre 1920 et 1940, une opération d’urbanisme est lancée visant à stopper les crues de la Loire, à faciliter les déplacements fluviaux et à concentrer le cours de la Loire pour maintenir un volume suffisant.

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Le comblement des anciens bras de la Loire permet de relier les îles Feydeau et Gloriette à la rive droite du fleuve. L’Erdre est détournée à l’aide d’un tunnel. Cette opération résout les difficultés de circulation et les problèmes d’insalubrité vécus par les Nantais.

Le visage de la ville en ressort complètement transformé, ce qui laisse place à des regrets au sein de la population. Celle que l’on surnommait “La Venise de l’Ouest”, perd une part de son identité au cours de ces opérations : le château de Ducs de Bretagne n’est plus immergé, l’Erdre ne coule plus en lieu et place du Cours des Cinquante Otages. Enfin, Gloriette et Feydeau n’ont plus d’île que le nom. La rationalisation de la ville ne rime pas avec l’embellissement espéré par les urbanistes.

Deux architectes locaux - Étienne Coutan et Camille Robida - réalisent un “plan d’extension” de Nantes qui comprend 1.200 hectares, parmi lesquels les îles (qui ne font plus qu’un) ainsi que les boulevards périphériques du nord de la ville. Ce sont finalement 700 hectares qui seront construits de manière dense tandis que les 500 hectares restants connaîtront un développement moyen, sous la houlette de Georges Sébille, qui prend le relais.

Surmonter le traumatisme de la guerre

Nantes n’est pas épargnée par les bombardements alliées de la seconde guerre mondiale. Aussi, près de 700 édifices se trouvent détruits et la rue du Calvaire ainsi que ses alentours doivent même être rasés. Les victimes humaines sont au nombre de 1463.

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C’est l’architecte Michel Roux-Spitz qui est choisi pour reconstruire la ville. Pour ce faire, il s’appuie sur le “plan d'extension, d'embellissement et d'aménagement” de la ville. De plus, il décide de concentrer le travail sur les 270 hectares situés au nord de la Loire, qui correspondent au coeur historique de Nantes. La Bourse est reconstruire à l’identique, de même que la place Royale. La place de Bretagne, l’Hôtel-Dieu ainsi que la rue du Calvaire sont, quant à eux, transformés.

Le renouveau urbain du XXe siècle

L’île Beaulieu, dont l’urbanisation était prévue dans le plan d’extension de la ville, se voit concrétisée dans les années 1960. La zone à urbaniser en priorité tend à devenir un exemple de modernité : les espaces verts viennent entourés des tours et bars d’habitations. Cependant, le projet n’est pas concluant et les constructions ultérieures augurent un retour du classique “îlot urbain”.

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Les projets de rénovation s’enchaînent à compter des années 1970. La Tour de Bretagne ainsi que le centre d’affaires attenant sont fortement critiqués. À l’écoute de la contestation, la municipalité inaugure une politique en faveur du patrimoine : certains secteurs historiques seront durablement sauvegardés.

Ce plan de sauvegarde, qui voit le jour en 1973, concerne 126 hectares, périmètre restreint par rapport au plan d’après-guerre. Heureusement, le centre-ville nantais n’a pas été déserté par la bourgeoisie. De plus, les différentes opérations d’urbanismes - haussmanniennes et d’après-guerre - permettent à Nantes d’éviter de nouveaux chantiers. De ce fait, l’action municipale dans les années 1970-1980 consiste uniquement en la création de voies piétonnes.

Dans les années 1980, L’Ouest nantais se trouve déserté en raison du déclin portuaire et de la désindustrialisation. Cela n’est pas sans entraîner des difficultés urbanistiques qui trouveront une solution au début du XXIe siècle.

Le quartier industriel Madeleine-Champ-de-Mars est l’objet de constructions visant à en faire une extension du centre-ville : création du centre des congrès, élaboration du siège de la banque CIO, etc. Cependant, les résultats escomptés ne sont pas atteints.

Depuis 1990, la politique urbaine de Nantes prend à cœur le fait d’ancrer la ville dans une continuité forte avec son passé. C’est la raison pour laquelle, l’île Feydeau est redevenue insulaire grâce à la mise en place de quais.

XXIe siècle, la cohabitation du patrimoine et de la modernité

Les années 2000 signent l’ère des grands ensembles. La multiplication des promoteurs immobiliers ainsi que les délocalisations d’entreprises parisiennes comme Bouygues Telecom, la SNCF ou encore La Poste permettent de concrétiser de nombreux projets.

Plusieurs dispositif fiscaux viennent avantager le domaine de la construction : loi Besson, loi Robien, loi Borloo, loi Scellier, etc). Aussi, entre 2004 et 2009, près de 11.000 logements neufs sont construits, ce qui engendre une hausse conséquente du prix du mètre carré.

Bien que les pouvoirs publics aient commandé 25% de logements sociaux obligatoires, l’étalement urbain ainsi les difficultés d’accession au logement par les personnes modestes, persistent.

Par ailleurs, l’architecture contemporaine parvient à faire une percée dans une ville marquée par le classicisme. Pour exemple, l’Île de Nantes prend appui sur son passé industriel pour offrir de nouveaux usages : le site des Chantiers est désormais une promenade piétonne pour les riverains et un lieu de tourisme.
Dans le quartier Madeleine Champ-de-Mars, ce qui était autrefois l’usine LU fait désormais office de scène nationale.

Enfin, Nantes connaît une certaine reconnaissance dans le domaine du numérique. Labellisée “Métropole French Tech”, la région accueille et soutient de nombreuses startups mais aussi des entreprises de plus grande envergure. Cette ambition, portée par les élus, va de paire avec une stratégie économique “ambitieuse” et “fédératrice” qui prévoit de dresser un véritable “quartier de la création” rassemblant 10.000 acteurs du numériques ainsi que des industries culturelles et créatives (créatifs, startupers, chercheurs, étudiants). La métropole prévoit également d’organiser des événements de portée nationale comme le Web2days ou la Digital Week. D’autre part, à Nantes, la filière numérique travaille de concert avec des filières d’excellence telles que la santé, l’aéronautique ou encore le développement des énergies renouvelables.

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Enfin, métropole de rang européen, Nantes connaît une démographie dynamique. Les 24 communes accueillent 7.400 nouveaux habitants chaque année dont 3.200 à Nantes. De plus, l’agglomération se présente comme l’une des moins des plus égalitaires de France.

Le rapport entre les 10% les plus riches et les 10% les plus pauvres à Nantes Métropole (comme d’autres agglomérations de l’Ouest) positionne Nantes comme une des agglomérations les moins inégalitaires de France. Ceci est lié à un double mouvement : le revenu des plus « pauvres » est un peu plus élevé qu’ailleurs et inversement le revenu des plus « riches » est dans une position intermédiaire. - Nantes Métropole.

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