Culture nantaise
Dans la cité des Ducs de Bretagne, les traditions ont su se maintenir au fil des siècles et permettent d’identifier une culture nantaise unique faite de langue régionale, de spécialités culinaires et de contes qui façonnent l’histoire de Nantes.
La langue régionale
Bien que la langue bretonne n’ait jamais connu l’hégémonie dans la ville de Nantes, sa pratique est toutefois avérée dès le Haut Moyen-Âge au sein de l’agglomération. Les recherches du linguiste Bertrand Luçon et du docteur en lettres Jean-Yves Le Moing attestent de l’origine bretonne de certains noms de villes comme :
- Carcouët : qui vient du breton “Quarquoet” (1269), transformé en “Kercouet”, la “fortification du bois”, à partir de 1545,
- Le Croisic : qui vient de “Croysic” (1596) signifiant “la petite croix” en breton,
- Loquidy : du breton “Losquidic” (11ème siècle) qui signifie “brûlis”,
- Le Grezou : qui vient du breton “Gezo” (1456), ce qui veut dire ‘les grées”.
Entre le 9ème et le 11ème siècle, Lambert II de Nantes et Alain IV de Bretagne emploient la langue bretonne. Par ailleurs, le chevalier Arnold Von Harff, d’origine allemande, nous lègue un glossaire des expressions rencontrées au cours de son tour de l’Europe médiévale. Aussi, au cours de son passage dans la cité des Ducs en 1499, il a relevé près de quarante dictons entendus sur place dans un dialecte breton.
À compter du 19ème siècle, la langue bretonne connaît un certain regain grâce à l’industrialisation et l’installation de populations rurales, notamment au sein des quartiers de Chantenay et de Barbin. Selon l’ethnologue Paul Sébillot, l’année 1886 présentait 12.7% de bretonnants à Nantes, soit 10.000 personnes. De nos jours, d’après les données de l’Office public de la langue bretonne, la ville compterait 3.000 bretonnants.
La gastronomie nantaise
Les spécialités culinaires nantaises sont variées et naviguent entre culture maraîchère, poisson de Loire ou de mer et héritage des îles.
L’invention de la “carotte de Chantenay” est le signe d’une certaine inventivité nantaise en matière de légumes. Actuellement, c’est plutôt la mâche qui fait l’objet d’un commerce florissant. Vendue dans tout le territoire européen, cette salade est connue par les locaux sous le nom de “doucette” ou “boursette”. De même, le poireau primeur, typique de la région, est apprécié pour sa texture fondante.
Pour ce qui est des condiments, c’est sur la côte Atlantique qu’il faut se rendre pour trouver la fameuse fleur de sel de Guérande ou encore la salicorne, une plante qui prenait autrefois le nom d’”asperge de mer” et qui remplace les cornichons en accompagnement des viandes froides et terrines.
Les fruits de mer sont également à l’honneur à Nantes, en raison du faible éloignement de la ville d’avec l’océan (moins de 60km). Les huîtres de Bourgneuf, les coques du Traict de Croisic ainsi que les langoustines et boucauds se marient parfaitement avec le local muscadet. Le poisson s’invite lui aussi à table après son débarquement au port de pêche de La Turballe : bar de ligne, daurade, saumon, brochet, turbot, merlu sont à l’honneur. Les sardines connaissent un vif succès sur les étals de plein-air.
Les plats typiquement nantais tendent à sublimer les produits locaux :
- le canard nantais est sauté avec des pommes et des raisins secs dans une sauce déglacée au muscadet,
- la côte nantaise est une spécialité froide à base de lard et de gelée de foie,
- le chateaubriant est une côte de boeuf connue pour sa tendreté.
D’autre part, à la base de beaucoup de plats locaux, on retrouve le beurre blanc, qui se compose de beurre fondu, d'échalotes, de vinaigre, de poivre et de muscadet. Cet onguent gourmand ne serait, à l’origine, rien de plus qu’une béarnaise ratée. Cependant, les Angevins aiment s’en attribuer le mérite. Le beurre blanc accompagne généralement les poissons ou les coquilles Saint-Jacques.
Le fromage le plus fameux de la région nantaise est le curé nantais. Il s’agit d’un fromage à pâte molle et à croûte lavée, fabriqué avec du lait de vache cru. Le curé nantais se décline au muscadet, aux herbes et aux algues.
En guise de dessert, vous pourrez vous régaler d’une fouace (pain brioché en forme d’étoile), de bottereaux préparés à l’occasion du carnaval (pâte à beignet frite) ou encore d’un gâteau nantais (moelleux au rhum et à l’amande nappé d’un glaçage translucide).
Les légendes et contes locaux
La tradition nantaise est liée à la forge, au travail des métaux ainsi qu’au commerce. Des épées datant de la Préhistoire ont été retrouvées dans la Loire et pourraient être le témoin de cultes divins liés au fleuve. Une plaque votive, exposée dans l’Hôtel de ville de Nantes, est dédiée à Vulcain, dieu romain du feu. Rome semble avoir confié à Nantes le patronage des forgerons et de la batellerie.
Plusieurs romans datant du Moyen-Âge mentionnent la ville de Nantes :
- c’est dans la cité des Ducs qu’Erec et Enide se marient,
- la tour de Bouffay retient prisonnière la mère de Caradoc,
- l’épée remise à Perceval est forgée par Trébuchet ; elle ne peut être ressoudée que grâce à l’eau d’une fontaine située aux portes de Nantes.
Par ailleurs, la ville de Nantes fait l’objet de légendes et d’hagiographies spécifiques. La ville aurait en effet été fondée par deux frères martyrs au IIIème siècle, Saint-Rogatien et Saint-Donatien, ce qui lui vaut d’être placée sous le signe des jumeaux. De plus, les Celtes auraient eu une vénération profonde pour des héros venus de la mer : les Dioscures.
Plusieurs hommes saints marquent également la ville de Nantes : Saint-Clair a la réputation de rendre la vue aux aveugles ; Saint-Similien, auquel une église est dédiée, est un chevalier ayant dompté un dragon par la seule force de ses prières.
Une autre légende raconte qu’un dragon aurait hanté la forêt qui se trouvait au nord-ouest de Nantes. L’animal terrifiait les habitants, s’en prenait aux animaux d’élevage, aux paysans et aux marcheurs. Trois chevaliers partirent à la poursuite de la bête : l’un d’eux ne survécut pas. Cependant le dragon fut terrassé par les deux chevaliers restants. Cette victoire engendra la construction de la chapelle Notre-Dame-de-la-Miséricorde, qui n’existe plus mais dont le nom se perpétue à travers le cimetière “Miséricorde”. La mâchoire du dragon aurait été conservée entre les murs de la chapelle jusqu’à la Révolution.
Deux autres figures de la gémellité sont parties prenantes de l’histoire de Nantes : Saint-Derrien et Saint-Néventer. Ils se seraient recueillis dans l’église nantaise Saint-Similien avant de se mettre à la poursuite d’un dragon situé dans le Finistère.
Sous le règne de Clovis Ier, roi des Francs, Nantes fut assiégée par les Saxons. Mais Marcil Chillon, chef du peuple germanique, fit battre son armée en retraite après avoir aperçu, dans la nuit, une impressionnante procession de robes blanches, se déployant à partir des églises Saint-Similien et Saint-Donatien.
Nantes aurait également été le lieu d’un épisode céphalophorique : Saint-Gohard de Nantes, évêque de Nantes et seigneur de Blain, fut décapité par les Normands le jour de la fête de Saint-Jean-Baptiste. La légende prétend que l'évêque aurait reprit sa tête pour marcher jusqu’en bord de Loire, où un bateau le conduisit à Angers. Les cloches de la ville se seraient alors mises à sonner d'elles-mêmes, jusqu'à ce que le clergé n’arrive en grande pompe pour accueillir le saint martyr, qu’on enterra dans l'ancienne église Saint-Pierre.
À la même période, Alain II de Bretagne dit “Barbe-Torte”, sur le point de reprendre la ville aux Normands, se trouva pris d'une soif terrible. Il invoqua la Vierge qui fit jaillir une fontaine que les Nantais ont nommée “Fontaine Sainte-Marie”.